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Entre confrères. [Aidan]

Entre confrères. [Aidan] Brandw10
Mer 16 Aoû - 4:36
Les bottes de cuir usées d’Horace claquaient sur les pavés de la cité à un rythme affreusement lent et peu mélodique, ce qui provoqua le soufflement agacé d’Ysold, qui accompagnait l’épouvantail engoncé dans son grand manteau sombre. La tatouée imposante avait horreur de marcher au ralenti, la cadence imposée par le fils Dolls avait le don de la rendre chèvre. Le lascar s’en amusait. Il vint pincer sa cigarette entre son index et son majeur avant de simplement souffler un nuage grisâtre en direction des cieux, fixant les impressionnants bâtiments culminants à des hauteurs peu régulieres. L’architecture délabrée de Xandrie était atypique et l’enfant des rues d’Epistolopi n’en était pas vraiment féru. Lui qui avait grandi dans les émanations de gaz, les lumières tamisées des enseignes par l'opacité de la fumée éternelle, c’était son chez lui. Alors, forcément, quand il traversait des coins avec une forte présence policière, il se sentait loin de chez lui. Ysold l’extirpa de sa rêverie en faisant raisonner sa voix rocailleuse.

« J’te laisse là, l’client est pas loin. J’vais y faire un tour. T’attends là ?
-Non, j’vais m’en j’ter un coup, histoire d’pas clamser l’gosier sec. »


Sa camarade haussa les épaules.

« Comme t’veux. J’en profiterai pour m’payer une p’tain, alors bois à la santé d’ma baise.
-J’y manquerai pas, queutarde. »

Ysold bifurqua à la prochaine intersection tandis qu’Horace continua sur sa lancée. Le masque rangé dans l’un des pans de son manteau tombant plus bas que ses genoux, le regard du pirate furetait d’un passant à un autre, s’interrogeant à la manière d’un écrivain raté sur la vie de ces inconnus. Horace croisa un solide gaillard que le rêveur imagina certainement champion de boxe clandestine, ce fut ensuite le tour d’une gamine souriante. La demoiselle devait avoir fêté ses dix-huit ans dans l’année, Horace lui prêtait déjà une future vie de muse d’un artiste raté.

Si le gaillard était particulièrement jovial en cette douce fin d’après-midi, il ne pouvait blâmer qu’une transaction cruellement à son avantage conclut quelques heures plus tôt. Le gus était parvenu à refourguer une came pitoyable délabrée à un prix exorbitant à des petits novices. Le tout bien évidemment sans le moindre remord. Après tout, le monde de la contrebande était impitoyable. Tandis que le blondinet errait mollement, ses pas le menèrent à un établissement bien connu dans le coin des chevaucheurs de la mer de nuages.

« L’ombre ailée. »

Expira à voix basse Horace. Sur l’enseigne était graver à même le bois les contours d’un des plus grands prédateurs volants. Un bref frisson parcouru l’échine du matin, avant qu’un sourie amusé n’habille sa frimousse couverte de suie. Un bref frisson parcouru l’échine du matin, avant qu’un sourie amusé n’habille sa frimousse couverte de suie. Sans plus d’hésitation, le bandit racla ses bottes contre un des rebords avant de pousser la lourde porte en bois massif de l’établissement. Immédiatement, la chaleur chaleureuse du feu de cheminée dans l’âcre réchauffa ses joues tandis que les effluves de bières bon marchés firent expirer de plaisirs le jeune homme. Les yeux clos un instant, le fils Dolls s’imprégna des senteurs et de l’ambiance musicale, un musicien pas maladroit campe derrière un piano s’appliquant à la mélodie.

Les doutes sur la profession d’Horace n’étaient que peu permis. À l’instar de la dizaine de pirates ou contrebandiers présent, l’allure négligée du blond l’excluait de toute appartenance à un corps militaire ou sérieux. Les renégats des cieux avaient la fâcheuse tendance de ne pas prendre très au sérieux leur dégaine, bien souvent reconnaissable par des confrères pratiquant le vol. À « L’ombre ailée », il y avait de tout, un agglomérat de marins, de patrouilleur, de contrebandier ou simple marchant, tous partageait un point commun, les envolées. L’espèce d’épouvantail entreprit de se rendre au comptoir, vissant rapidement son postérieur sur l’un des sièges finement ouvragés. Un coup de menton respectueux plus tard en direction du comptoir, le garçon fit entendre sa commande en direction du tavernier affairée jusqu’alors à nettoyer son mobilier.

Loin d’être une légende dans l’aviation, ni même un nom connu, reconnu et respecter, le pirate ne se distinguait ici que par son appartenant à la loge des félons, la loge Félonne. Flotte de navire revendiquant et clamant son appartenance à la piraterie, elle avait pour habitude de sévir et d’assaillir les convois marchands, préférant les proies faciles aux plus épineuses. Des hyènes cumulant à un haut degré de déloyauté, d’égoïsme et autres qualités peu recommandables sur un CV. L’un des sigles coud sur l’une des manches du long manteau d’Horace trahissait son appartenance. Cependant, il n’était que énièmes pirates parmi des centaines et des centaines d’autres. Le dernier Dolls ne possédait pas l’outrecuidance de se croire particulier ou unique, voire reconnaissable. Les flottes de pirates étant légion, le gaillard ne s’inquiétait en rien. Le tavernier rondouillard en plein grignotage d’une mie de pain déposa devant le pif d’Horace un chope pleine à ras bord.

« Merci bien l’artiste. »

S’exclama l’originaire d’Epistopoli après avoir discipliné une mèche rebelle, faisant glisser ensuite les trébuchantes sur le comptoir. Il porta le doux liquide doré à ses lèvres avant de le laisser pleinement s’écouler le temps d’une gorgée dans sa gorge. Un « Aaaaah » chuchoter plus tard, le jeune homme pivota en direction de la salle, les coudes caler sur le comptoir, la chope en main et ses doigts pianotant le rythme entraînant du musicien.

Passant d’une trogne à l’autre, l’observateur au cœur d’acier compris qu’il devait certainement débarquer à une fin de service des mandatés tant les « soldats » étaient présents. M’enfin, rien ne pouvait l’empêcher de déguster cette bière aux houblons délicieux, d’autant plus après une si bonne affaire.

« Quelle vie… »