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Une randonnée sous les étoiles

Une randonnée sous les étoiles - Page 3 Brandw10
Ven 5 Avr - 7:30

Marché faustien

Violette - Duscisio



Naïf. Quel naïf ! Ce Duscisio avait un cœur sincère, mais il mettait les pieds dans le plat. A la fois avec Violette, comme on enfumerait le terrier d’un ours brun et à la fois avec Feynor. Jamais elle n’aurait imaginé qu’il révèlerait ce secret arraché aussi inutilement.
-« Allons Violette. Un élémentaire a beau être souvent âgé, c’est un enfant aux yeux de sa race. Nos réalités leurs sont si éloignées, qu’ils ont parfois du mal à se rendre compte de nos émotions, de la douleur et de la violence dans la vie des humains… » avança-t-elle d’une voix basse en essayant de pondérer la réaction de Violette.

Elle connaissait le risque face au tempérament d’une marmite constamment sur le point de déborder de colère et d’acrimonie. Loin d’elle l’idée de se fier à ses affirmations je m’en-foutiste. La maraudeuse dévoilait ici l’étendue de sa blessure et toute la hargne prête à être déployée pour ceux qui la rouvriraient. Peut-être Ellendrine serait-elle l’une d’elles ? Au moins le fardeau serait dilué entre eux.


Mais la Mandragore devait capter son attention. Dévoilant d’ailleurs de manière opportune que la situation était différente de ce qu’ils croyaient. Il y en avait un qui s’était fait discret. Il riait bien sous cape…

Ce gredin de Sangrépées mijotait évidemment quelque chose. On pouvait lui reconnaître une certaine finesse et le sens de la mise en scène. Car il avait eu la délicate attention de les laisser chacun poser les questions qui leur brûlaient les lèvres à la Mandragore. Et aussi de les laisser exposer le fond de leurs âmes au grand jour, avant de renverser la table et d’abattre son carré d'as

Ainsi parjuré, l’homme Loup ne réunissait pas les conditions de la conciliation. Il venait en stratège conquérant et les mettait devant le fait accompli. Trompés, poursuivis par les ours. La Mandragore devait ruminer à son tour sa vengeance, quand bien même son avatar avait moins fière allure. Mais ce n’était qu’un détail pour la puissante entité.

Prise en étau sous la pression psychique écrasante, elle et Farouk se recroquevillaient au sol, en tentant de le repousser pour ne pas finir à plat ventre. Ils n’étaient que figurant dans sa pièce de théâtre. S’ils les avaient amené avec lui et les gardaient en vie, c’est qu’ils pouvaient lui être utile. Ellendrine s’attendait à ce genre de trahison depuis qu’on lui avait exposé le programme de l’expédition dans les montagnes. La manière dont Feynor s’y était prise l’avait toutefois prise de court. Et plus qu’énervée.

Sangrépées ressemblait à un très bon méchant de fiction, au faîte de sa gloire. Son discours l’atteignait. Avec l’intervention de Violette, elle se rappelait d’autant mieux le panier de crabes qui les enfermait. Tous pourris. Tous égoïstes. Elle ne devait pas se placer en position d’antagoniste. Ce n’était pas ici l’héroïne.

Duscisio et Farouk grimaçaient sous la pression redoublée des chaînes invisibles, tandis que Feynor tendait sa main pour offrir un marché Faustien.

-« Libérez-moi, vieux loup ! Si vous entendez me parler, ce ne sont pas des manières ! »
Sans doute amusé par le toupet de l’archéologue, il desserra assez son étreinte pour lui permettre de se redresser. Elle reprit haleine. Débraillée qu'elle était, elle était tout en flegme. En dessous, sa peur était pourtant bien réelle.

-« Il est évident que je n’ai ni les moyens ni l’intérêt de vous défier, Feynor. Je ne suis venue ici pour livrer de duel à mort à personne. Inutile de voir en moi ou Farouk un adversaire. »
-« Cela signifie-t-il que vous acceptez mon marché, milady ? » souligne-t-il, rusé, de son sourire ambigüe brillant toujours d'un inconfortable éclat carnassier.

-« Votre belle coexistence tient à peu de chose, femme humaine. »
C’était la Mandragore qui faisait une saillie. On devinait surtout qu’elle n’était plus si sûre d’elle. Ses racines tentaient discrètement de se reconstituer et de s’affairer en arrière-plan. La scientifique en elle se demandait ce qu’il se passerait si Duscisio et la Mandragore se coordonnaient pour attaquer l’homme-loup à ce moment précis. Parviendraient-ils à le surprendre ? Pourrait-elle laisser l'élémentaire se faire tuer? Elle espérait qu’elle connaître la réponse. Après tout, ce n’était pas sa guerre.

-« Mandragore, vous vous battez pour survivre. Comprenez simplement que je fasse de même, si vous avez trouvé dans votre propre écosystème un prédateur ultime. En tant que scientifique, je n’ai de toute façon pas à interférer avec le gagnant. »

-« Pour en revenir à ma proposition, si vous permettez, Ellendrine… »

La vérité est que tout n’était pas si limpide dans son esprit. Elle jeta un regard à Violette, toujours jetée à terre par un dôme de fer invisible. Et à Duscisio, qui n’était pas plus allégé. Ils n’avaient pas à être tous ennemis. Mais il y aurait au moins un perdant. Mieux valait choisir sagement. Être capable de réagir rapidement, quoiqu’il se passe. Le temps est tout ce qu’elle avait à offrir. Pour elle-même. Et pour les autres…

-« J’aimerais seulement comprendre, Feynor… Mon esprit en a besoin. Même si le temps nous manque, dites-moi un peu comment vous voyez le tableau exactement. Quelle est votre vision des choses ?... Vous voulez …tuer la Mandragore ?... Ou seulement prendre le dessus sur elle et détrôner les ours ?... Resterez-vous dans les montagnes en tant que chef des zoans loups ?... peut-être que l’ambition de prendre la tête de la Guilde des Maraudeurs vient à vous… j’y verrai bien un esprit aussi agile et un pouvoir aussi grand. »

Son regard oblique la détaillait d’une manière indéchiffrable. On n’apprenait pas aux vieux singes à faire des grimaces. Il fallait être fou pour tenter de manipuler un manipulateur d’exception.

-« Vous êtes un personnage insolite, Sangrépées. Pouvez-vous m’en vouloir de tenir à savoir dans quoi je m’engage et à qui je dédierai la chronique de ce voyage ? Il va de soi que je ne peux fermer les yeux sur les connaissances qui sont en jeu… "


Ven 5 Avr - 11:48



Temple des ours / Mont d'argent

Fanthret 1901



La leçon de vie n’a pas plus à Violette qui rétorque aussitôt la vision et le sens de la vie aux yeux d’un élémentaire aussi jeune que celui qui se trouve face à elle. Mais n’a-t-il pas une certaine forme de sagesse derrière tout ça ? À ses yeux, la vie d’un être humain a autant de valeur que n’importe quel être vivant sur le continent. Certes, la jeune femme lui donne une explication des plus primitives ou encore celle de comparer à une famille qui n’existera probablement jamais, dévoré par les aléas de la vie. Il ne fallait pas oublier le mot qui rappelle ce qu’il est : un élémentaire.
Cela ne le braque pas, il a déjà bien accepté qu’il ne serait jamais humain malgré les apparences. Il ne pourra jamais vivre comme un humain. Plutôt que de s’offusquer, il laisse Ellendrine répondre à cette provocation avant d’en ajouter un mot.


- Ne vous trompez pas sur mon compte, humain… dit-il en appuyant à son tour sur le dernier mot. Je ne connaîtrais point ce que vous me décrivez, mais il en reste pas moins que la mandragore pense de la même manière… On vous demande de vendre votre enfant pour le tuer parce qu’il a une substance rare dans le corps, vous allez accepter ? Mettez-nous à notre place. Nous le faisons tous les jours pour votre santé, alors n’allez pas nous imaginez égoïstes.

S’il se met à la place de toutes les plantes du monde, c’est en connaissance de cause. Une plante n’a aucune conscience, si bien qu’il laisse imaginer à Violette que son exemple leur en donne une pour lui donner une comparaison. Elle est certes cruelle, mais elle n’en reste pas moins proche de la vérité.

- Vous avez demandé un herboriste… Je suis venu. Malheureusement pour vous, je suis un élémentaire avec sa vision du monde. Va falloir vous y faire.

S’il parait un peu plus agacé sur cette dernière phrase, il se retourne sur Freynor qui aura sans doute causé la situation qui sur les quelques secondes suivantes. La vérité éclaircie par la Mandragore sur la cérémonie au-dessus d’eux, camouflé en combat par les paroles de Freynor qui sut s’en trouver convaincant. La fusion partielle avec la mandragore qui monte sur site comme l’indique son instinct de survie sans pouvoir en apprendre plus que sa vitesse de propagation et sa faim.
Duscisio s’écarte d’un pas pour ne prendre ni un coup quand elle dégaine, ni une balle qui vise indubitablement Freynor sans pouvoir l’atteindre. La cérémonie… Duscisio se rappelle que maintenant que la petite chèvre en fait partie et doit sûrement se trouver là-haut, morte ou pas loin de cet état pour nourrir la Mandragore. Si elle a été chassée aujourd’hui, c’est qu’elle a cherché à fuir son destin le jour même. L’adorable petite fille finira donc en nutriment. La petite pensée pour cette enfant paralysait Duscisio quelques secondes seulement avant de se trouver sous une importante pression. L’élémentaire à cette étrange impression de pousser sous un lourd rocher et se laisse porter par une neutralité naturelle. Il n’a pas l’intention de bouger pendant que les humanoïdes discutent entre eux. Ses seules actions se limitent à retrouver une connexion avec la Mandragore afin de discuter avec elle en silence, dans le langage des plantes, par le biais de signaux électrique infime dont ils ont le secret.

Le cristal purifié de Freynor le pousse à se faire oublier. Notamment parce qu’il a bien vu que malgré la tentative de sa congénère, elle n’a rien pu faire contre la magie qui a anéanti racines et corps d’apparat. La conversation entre plantes se fait dans le silence. S'il essaie de savoir quelle possibilité ils ont de neutraliser Freynor pendant qu’elle discute avec lui pour connaître ses intentions. Encore une fois, sa naïveté propre lui fait comprendre que l’homme restera égoïste comme le vieux loup qui cherche simplement à prolonger sa vie malgré ses limite au détriment d’un autre être vivant. Une vie contre une autre. Le choix est aussi compliqué pour celui qui veut survivre et celui qui donne.
Quand bien même, Freynor donne une nature vicieuse à la danseuse des lacs, que Violette lui en retourne le compliment. Au moins, sur ce point, Duscisio est d’accord avec la jeune femme malgré son silence. Le marché passé entre eux ne concerne pas l’élémentaire qui est totalement oublié dans cette situation. Sans doute aveugler à l’idée qu’il puisse avoir été envoûté par la mandragore et l’apparence qu’elle s’est fabriquée pour attirer sa sympathie.

Leur conversation silencieuse se poursuit pendant ce temps. De nombreux sujets sont évoqués. Celle de lui céder l’une de ses filles en échange de sa tranquillité sur ce territoire. Une idée pouvant leur permettre de neutraliser le chef de clan, jusqu’au fait d’assouvir l’égoïsme de chacun d’entre eux tant que leur vie respective n’est plus menacée. Freynor, Violette, Ellendrille ou les trois clans doivent y trouver leur compte pour finalement retrouver une qualité de vie profitable à tous. D’un point de vue extérieur, l’élémentaire est immobile. Seuls les quelques roses blanches résistent, montrant qu’il est encore plein de vigueur malgré la pression et toujours actif malgré son mutisme. Il est plus compliqué de trouver un accord ou un plan avec la Mandragore que de rester en vie dans une telle situation.

C’est alors qu’il fait le choix d’écouter ce que les humains ont à dire pour que tout le monde reste en vie, humains comme plantes. À la fin, Duscisio fait ce qu’il sait faire de mieux : attendre.

Ven 5 Avr - 17:59

Aide moi...

Ellendrine - Duscisio




Le loup souriait légèrement en regardant Ellendrine.

Ma foi… Vous savez, la vieillesse fait que ce genre d’ambition juvénile n’a plus de prise sur nous. Pourquoi voudrais je prendre ce genre de poste à double tranchant alors que je suis déjà moi-même maitre de clan et avant tout un explorateur avide de liberté… Je n’ai pas l’intention de vous expliquer tout ma vie, mais sachez juste madame, que j’ai pas l’attention d’attendre de mourir de vieillesse, je ne veux pas mourir. Et aujourd’hui j’ai le moyen d’échanger ma mort à jamais avec celle d’une plante monstrueuse qui ne vit qu’à travers les cadavres et le sang.

Il n’y avait pas à réfléchir énormément pour savoir ce qu’il sous-entendait pour là. Au final Feynor n’était rien d’autre qu’un mortel qui craignant la mort était à la recherche de l’immortalité. Une chose par le biais des cristaux, et notamment un, rare, le cristal purifié de jouvence. Le puzzle s’assemblait petit à petit. Ce genre de cristaux était rare, encore plus purifié pour quelqu’un qui n’avait pas de pouvoir ou de réseau extérieur. Mais si quelqu’un avait fait une offre crédible à Feynor, qui ne pouvait pas rationnellement se refuser… Cela expliquerait bien des choses…

Quoi qu’il en soit, si la motivation personnelle de toute cette histoire avait l’air d’intéresser Ellendrine et dans une moindre mesure Duscisio, ce n’était absolument pas le cas de Violette qui n’en avait strictement rien à foutre. Seule sa mission avait une importance pour elle et la seule chose qu’elle tentait de comprendre chez le zoantrophe c’est si, il serait un obstacle ou non.

Comme vous pouvez le voir, on est tous d’accord. Enfin moi surtout m’en fout, donc relâche moi.

L’attention du loup se détournait vers la maraudeuse.

Je connais la réputation des tiens… Tu ne m’auras pas.

Humpf. Je ne tue que pour des raisons professionnelles. Bon… y a bien les crimes d’honneur et de sang certainement mais on est pas dans ce cas de figure. Si tu ne me bloques pas, je te bloque pas. Donc je n’ai qu’une question. Qu’est ce que tu veux prendre exactement.

Voulait-il lui voler ses fleurs ?

Feynor réfléchissait quelque peu.

Je ne veux pas ce que tu cherches. Je ne souhaitais que récupérer le bulbe.

Donc tout est bon nan ?

Il semblait hésiter.

Arrête de tenter de faire croire que tu es en position de force absolue. Je suis un soldat, je connais les limites de ce genre de pouvoir.

Elle activait soudainement sa force humaine pour se déplacer de deux pas en avant, déstabilisant un instant le loup avant qu’il augmente la pression pour la contenir en diminuant celle exercé sur Ellendrine, Farouk et Duscisio. La télékinésie était un pouvoir qui pouvait sembler tout puissant à cause de l’impossibilité d’esquiver ses attaques, néanmoins comme toute chose en ce monde, il avait ses propres failles. En matière de théorie du combat, il existe deux grands moyens de s’opposer à un télékinésiste.

Le premier était de disposer d’un pouvoir qui permette de lutter physiquement contre la force mentale de l’attaquant. C’était ce que permettait les pouvoirs physiques, Violette en étant le plus grand exemple. Il fallait plus de force pour retenir quelqu’un capable de porter une pierre de 100kg qu’un individu normal. Force physique contre force mentale.

Le second moyen était de déstabiliser l’attaquant par le biais de pouvoir qui permettait d’attaquer à distance. C’était notamment le cas des pouvoirs élémentaires. La télékinésie étant un pouvoir de force mentale, si le lanceur devait diviser son attention, la pression sur le groupe en serait automatiquement réduite.

Tu n’es pas autant en position de force que tu veux le faire croire…

Certes… Nos objectifs coïncident. Et il faudra dégager les ours qui se mettront sur notre chemin en remontant…

Violette fronçait les sourcils.

Par contre, je travaille pas sans avoir le paiement à l’avance.

Feynor souriait encore une fois avant de lever la main vers des racines et de les dégager de force par télékinésie. Elle cachait une porte dont on pouvait apercevoir des fleurs…

Et comment tu sais aussi bien où elles se trouvent…

On m’a bien renseigné.

Il relâche alors totalement la pression sur Violette, Ellendrine et Farouk, désormais libre de leur mouvement. Bien que la confiance ne fût pas totale et qu’il les surveillait toujours. L’inverse était aussi vrai de toute façon. Le seul toujours coincé était Duscisio, dont Feynor se méfiait particulièrement à cause de sa nature d’élémentaire de nature et de ses propos.

Tandis que Violette se dirigeait vers les fleurs, Feynor se tournait en direction du bulbe. Encore une fois, il avait l’air de bien savoir où il était.

La mandragore jusqu’ici était silencieuse. Toutefois à travers les connexions entre racine, Duscisio pouvait entendre ceci.

Duscisio… Je t’en supplie… aide moi… C’est homme est dangereux… celui qui l’aide dans l’ombre surement bien plus… Pitié… ne les laisse pas me prendre…

Que faire Duscisio ? Combattre tout le monde ? En débaucher certain ? Peut être qu'Ellendrine saurait se laisser attendrir à moins que la soif de connaissance soit du coté de la mandragore. Pour ce qui était de Violette, difficile de la convaincre sans que la mandragore face une concession sur ses fleurs. Indépendamment de ce problème... tout n'était qu'une question d'argent...
Lun 8 Avr - 20:25

Remonter à la source

Violette - Duscisio



Feynor Sangrépées avait l’air surpris par ses questions, mais il se démarquait par une forme de courtoisie dans ses réponses. Il ne voulait pas mourir. Or donc, il avait pour ce faire besoin de dépouiller la Mandragore de sa substance vitale, à moins qu’il n’ait seulement besoin de l’asunettir à ses besoins personnels, ce point restait à éclaircir. En tout cas, il voulait tromper la mort. Et rester le maître du clan des loups des Monts d’Argent.

Peut-être que derrière lui se cacher une ombre planante, un commanditaire avec lequel il croyait pouvoir faire commerce d’immortalité. Elle se demanda s’il s’était fait rouler. Peu de gens avaient intérêt à réellement distribuer de tels cadeaux.

L’échange se recentra autour de la maraudeuse, qui attira les attentions du zoanthrope, ce qui laissa le temps à l’archéologue d’éclaircir ses pensées. Elle se souvint notamment qu’avant son ascension, sa piste la conduisait vers le XIIIème Cercle. Ambitieux qu’il était, voyageur, curieux et éduqué qu’il se montrait, Feynor se semblait pas regarder au-delà de son près carré… elle se demandait donc si cette instance capable de lui fournir un pouvoir rare ne pourrait pas être le Cercle. Obnubilée par son objectif sans se soucier des conséquences, Violette ne se rendait pas compte de ce que son désintérêt pourrait engendrer comme cascades d’effets jusqu’en Xandrie.

Pour peu que son scénario soit juste, que pourrait faire l’organisation du bulbe de la Mandragore ? Elle générait apparemment une toxine, une drogue, pour laquelle les gens se battaient. Etait-ce un moyen d’asseoir les flux financiers du terrorisme ? Ou au contraire, une arme secrète jalouseuement gardée pour préparer un empoisonnement de masse ?

Du regard, elle balaya la grotte. Farouk et Duscisio, toujours courbés, ne semblaient pas manifester le moindre danger. Farouk, presque méditatifs, se repliait sur son intériorité. Duscisio paraissait en catatonie. Elle se demandait si elle pouvait compter sur lui comme élément disruptif, ne pouvant compter que sur ses propres forces.

Mais la confrontation avec Violette devint tout à coup très pertinente. Ainsi, il semblait y avoir une limite à la force brute exercée par le télékinésiste. La maraudeuse forçait le loup à puiser goulument dans ses réserves en lui résistant de manière spectaculaire. Ellendrine, pour sa part, se serait contenté de faire léviter Violette pour lui retirer tout appuie au sol et la laisser délivrer autant de jouls qu’elle voulait pour se débattre en tournant sur elle-même. Mais elle n’allait pas livrer son idée au zoanthrope qui déversait goulument son énergie sur elle.

Si la Mandragore et Duscisio agissait de conserve et qu’elle et Farouk faisaient diversion au moment critique, ils avaient peu être une chance de le vaincre.
Un consensus semblait trouver. Pour donner l’impression de prendre sa part du gâteau sans demander son reste comme les autres Ellendrine adressa à Farouk :
-« Part cueillir délicatement l’une des fleurs pour moi, s’il te plaît, Farouk. »

Comme Duscisio sembla soudain accrocher son regard d’un air suppliant, en toisant la Mandragore et leurs ronces et racines entrelacées, elle comprit que quelque chose se jouait entre eux. Elle devinait facilement combien la Mandragore devait être éperdue. Son espoir était seulement que ce qu’elle croyait que Duscisio la priait de faire n’était pas totalement désespéré mais intelligemment calculée.

-« Attendez, Feynor ? »
A contre-cœur, le zoan se tourna vers elle en se redressant de sous les racines furieuses qu’ils maintenaient dressées hors du chemin.
-« Ce n’est pas le meilleur moment, faites vite que je récupère mon dû, avant que les ours arrivent. »
Elle avança pour se placer juste en face de lui, le regardant dans les yeux, ce-faisant, elle masquait en partie la silhouette de l’élémentaire quelques mètres derrière eux.

-« Vous semblez travailler en alliance avec quelqu’un. C’est le genre de contact qui m’amène indirectement dans votre région. Je me rends compte qu’à l’ère actuelle, il faut savoir réviser ses positions pour évoluer selon ses souhaits… Je voudrais que vous m’en disiez plus. »

Elle se dessinait ainsi une ambition personnelle inattendue aux yeux du zoan, quand la maraudeuse était plus explicite dans son désir d'ascension.

Un sourire flagorneur para la frimousse de Feynor.
-« Plus tard, Ellendrine. Quand j’aurais le bulbe, et que les ours seront mis au pas. Vous pourrez si vous le souhaitez m’accompagner à la grotte du pic ardent pour les rencontrer, à vos risques et périls… »

Et il se détourna pour aller récolter son funèbre butin. Le temps des contournements était fini. Maintenant ou jamais Duscisio. Elle se tenait prête à aider au cas où, la main non loin de sa taille où se cachait son nascent de chronomancie et son totem d’exerus. Violette arborait un air transcendé qu’elle ne lui connaissait guère. Son visage, éclairé de ravissement, le bout de ses doigts effleurant la base d’une inflorescence.

Mar 9 Avr - 10:58



Temple des ours / Mont d'argent

Fanthret 1901



L’échange d’une vie contre une autre. La mandragore a beau être monstrueuses aux yeux de n’importe quel humain qui en est sa victime depuis trois générations, tout le monde n’est pas du même avis et ce fut déjà partager. Duscisio qui avait déjà choisi son camp n’a pas l’intention de laisser faire ce que veut Freynor. Finalement, on en revient à la volonté de vivre qui s’égalise entre lui et la plante mythique qui habite ses lieux. Dès l’instant, où sa recherche d’immortalité a été exposé, l’élémentaire ne lui donnerait point cette chance.

C’est Violette qui se porte indirectement volontaire pour se sortir de là. L’attente de Duscisio fini toujours pas entrevoir un début de solution au moindre problème qu’il finit toujours par rencontrer. Oscillant ses yeux de la mandragore à la jeune femme le temps d’en voir l’échange, l’apothicaire reste toujours immobile et en pleine coordination. Le poids s’allège sur leurs épaules quand le vieux zoantrophe remarque la force augmentée de Violette qui tente de l’impressionner, de le menacer et donc de porter toute l’attention sur elle. La discussion avec la mandragore peut continuer pendant que les négociations musclées ont lieu.
Une petite voix intérieure, une sorte de télépathie sylvestre, un appel à l’aide de la mandragore dont elle avait déjà sa réponse. Jamais Duscisio ne la laisserait se faire tuer. Cela serait contredire ce qu’il a énoncé jusqu’à présent. Il n’oublie pas non plus pourquoi il a été missionné.

— Je n’ai aucunement l’intention de t’abandonner. Répond-il via la connexion privée entre ronces et racines. J’aurai simplement une condition… Un sacrifice nécessaire. Peux-tu faire une exception ?

La Mandragore et Duscisio se regarde sans prononcer un mot. Le sacrifice énoncé ne concernait qu’une simple fleur pour Violette. Il ne cache pas qu’il pourrait lui demander un peu plus par la suite, car les humains sont imprévisibles.

— Avant d’accepter, nous devons neutraliser Freynor… Coordonnons nos actions…

Si la cible n’est que Freynor, ses cristaux sont problématiques. Pour le neutraliser, il faut soit les trouver, soit le forcer à se concentrer sur autre chose. Il n’aime pas la seule idée qui lui vient en tête, mais il n’a pas le choix. Les quelques secondes de réflexion pendant que Violette attire toute son attention sont comptées. Il doit parfaitement jouer sa carte maîtresse. Par ses actions, le vieux loup montre bien qu’il craint encore les racines : il les écarte pour avoir ne serait-ce que quelques millisecondes de plus. Et maintenant qu’il est libre de ses mouvements, l’élémentaire doit agir vite.

Même si Freynor faisait le nécessaire pour écarter les racines de son chemin, il y avait de nombreuses ronces qui se sont dissimulées ici et là pendant que Duscisio était resté au sol. Avant qu’il n’agisse, l’une de ses roses blanches était encore tombé, montrant qu’il n’a jamais été inactif malgré son immobilité. Le fait qu’il soit concentré sur Violette, qu’il puisse se relever ne change que ses possibilités de mouvement.
Derrière le chef de meute, un mouvement très discret se profile. Quelques ronces se permettent une petite fantaisie en s’entrelaçant pour en former un pieu de ronce, suffisamment fin et solide pour servir d’arme. Une pointe de flèche de bois qui vint traverser sa cible contre toute attente, bien trop rapide pour être naturelle. Dès l’instant où la flèche de ronce lui transperce le poumon gauche proche du cœur, un caillou ayant servi de pointe de flèche tombe de son extrémité. À cet instant précis, le vieux loup a le choix entre maintenir le pouvoir des cristaux et ses fonctions vitales. Derrière lui, les racines de la mandragore s’avancent face à cette nouvelle source de nourriture, un sang chaud qui, malgré la faible quantité, les attirent.
Pendant ce temps, d’autres ronces se sont emparé des chevilles et des bras de l’homme tout en cherchant les cristaux de pouvoir. Une autre lui a saisi la gorge en venant du plafond. Les épines ne lui font pas de bien non plus puisqu’elles s'incrustent dans la peau, menaçant encore plus sa survie face à la Mandragore qui en demande une part.

- La nature est cruelle, n’est-ce pas ? Exprime l’élémentaire dans un ton de voix si grave et un regard si sévère qu’on pourrait le croire en colère. Elle vous donne la vie et dès l’instant chacun d’entre nous marche lentement vers la mort, la prolongeant au détriment de celle d’un autre être vivant. Vous ne trouvez pas une ressemblance ? Que ce soit, vous ou la mandragore, vous finissez toujours par tuer pour survivre quelques jours de plus.

Sa main droite, montrant sa pleine nature végétale faite de bois et d’épine, accompagne la saisie du corps du zoantrophe par les ronces pour le soumettre. Il le laisse pourtant en vie. S’il vient à s’en défaire, il ne pourra pas convaincre longtemps la mandragore de ne pas l’achever malgré le danger qu’il représente.

- Dites-moi, mademoiselle Mandragore. Questionne-t-il soudainement, un peu plus tranquille. J’aimerais en savoir un peu plus sur vous et les mandragores. Malheureusement, cet environnement n’est pas des plus agréable et sa traversée menace un peu trop ma fragilité naturelle au froid… Ce serait possible de vivre ailleurs ?

C’est qu’une idée passagère pour retrouver un calme apparent. Sans oublier qu’il commence déjà à la questionner pour connaître son mode de vie et celle de son espèce.

— Quant à vous, Violette, une fleur vous suffira-t-il pour votre mission ? Je n’ai aucune envie, et elle non plus, de porter atteinte à l’intégrité de la Mandragore… Elle est bien trop précieuse.

S’il surveille la moindre tentative de Freynor du bout des ronces, Duscisio essaie aussi de négocier avec la maraudeuse de laisser la plante en vie, en tant qu'herboriste bien entendu.  

Mar 9 Avr - 16:23

Aide moi...

Ellendrine - Duscisio




Le loup souriait légèrement en regardant Ellendrine.

Alors que les ronces passaient en part et part de son corps, Feynor crachait du sang tout en commençant à s’affaisser, relâchant ensuite quasiment immédiatement les dernières pressions télékinésiques qui bloquait l'élémentaire. Violette, bien qu’elle avait tout vu du fait de son champ de vision quasiment absolu, s’était contenté de froncer les sourcils. Ainsi cet élementaire savait tuer ? Tout le monde n’en était pas capable, et il ne lui semblait pas pour autant qu’il soit habitué de ce genre de chose… La morale élémentaire était-elle si différente qu’à leur yeux prendre des vies humaines n’était rien ? Ou Duscisio était tout simplement un tueur de sang froid comme elle pouvait l’être elle-même.

Il faudrait qu’elle fasse plus attention à lui. Il pouvait être potentiellement plus dangereux qu’Ellendrine finalement. Encore plus s’il était impacté par des émotions et de l’attachement pour tout ce qui lui rassemblait sur le plan biologique. Enfin… quoi qu’il en soit, cela n’était pas sa priorité maintenant. Tant qu’elle avait ce qu’elle voulait, personne ici n’était son ennemi.

Tandis que Feynor restait silencieux, la tête baissée en avalant le coup, l’élémentaire continua à parler, s’adressa tout d’abord à la mandragore pour lui demander s’il lui était possible de changer d’environnement.

Avec un corps toujours à moitié détruit par les précédentes attaques du loup, la plante lui répondait étonnamment sans trop de mal, après la destruction de cet avatar n’était rien pour elle, ce n’était pas la véritable mandragore.

Je ne sais pas. J’ai toujours vécu ici. Je ne sais même pas pourquoi je suis née ici.

On pouvait sentir une pointe de doute dans sa voix. De toute évidence, elle n’avait elle-même pas vraiment envie de se déplacer. Les plantes était une des races qui appréciaient le moins le changement, et descendre de la montagne signifierait se rapprocher des hommes et du danger. Ces pics, quand bien même ils étaient hostiles, lui permettaient de se protéger contre l’avidité des civilisations.

L’herboriste se tourna ensuite vers Violette qui s’arrêta dans sa marche quand l’homme s’adressa à elle.

Mon contrat ne précise qu’une fleur. Tout ne le reste n’ai que du superflus et n’a pas d’importance. Si je n’ai pas d’obstacle pour réaliser ma mission, je n’ai aucune raison de lever ma lame.

Tout dépendait du degré de résistance de la mandragore. La maraudeuse reprenait ainsi sa marche vers les fleurs quand soudainement un mur de racine lui barrait la route.

Attends ! Négocions quand même !

Est ce que tu penses être en position de négocier ?

Usant de ses pouvoirs, Violette devenait intangible et passait au travers des racines comme si elles n’existaient pas.

D’autant que vous allez avoir un autre problème…

Feynor commençait enfin à bouger. On savait qu’il possédait deux cristaux, un d’attraction et un de télékinésie. Mais en plus de cela, il possédait un 3e pouvoir… Celui de sa race. Subitement, Feynor devenait plus grand, plus gros, plus fort…

wouf:


Tout en hurlant de rage, il trancha sans hésitation la racine qui venait de le pourfendre sans retirer ce qui était déjà à l’intérieur de son corps.  L’avantage d’une telle transformation, c’est que cela permettait de tricher un peu sur les blessures sans avoir besoin ou sans posséder de capacité de soin et de régénération. Les changements du métabolisme en quelque chose de plus fort et plus résistant n’améliorant que sa situation tandis que la rage bestiale contrecoup naturel de la puissance des zoantrophes lui faisait ignorer les dégâts et la douleur le temps qu’il se calme. Autant dire qu’un simple domptage ne suffirait pas à le retenir.

Toutefois, quand bien même Feynor était un loup expérimenté, ce qu’il avait gagné en force, en résistance et en vitesse, il l’avait perdu en intelligence. S’il pouvait toujours utiliser ses cristaux, c’était toujours.

Avec une rage et une force démente, il commença à déchirer les ronces qui le touchait tout en repoussant les dernières avec un sort d’attraction qui les repoussait tout aussi sauvagement de son propre organisme. Il faudrait quelque chose de plus solide que les ronces pour retenir un loup-garou. Quoi qu’il en soit, elles avaient au moins permis à ce que personne ne soit pris au dépourvu, car la suite des événements allait être dangereuse.

On aurait pu penser qu’une fois libéré, le lycan foncerait sur Duscisio pour régler ses comptes avec lui, mais non. L’instinct animal priorise toujours de s’en prendre au plus faible avant tout de chose. Et l'occurrence, la plus âgée vis à vis de sa race dans le groupe c’était Ellendrine. Voici donc qu’un loup-garou fonçait sur elle. Il fallait gérer ça. Il envoya alors une nouvelle salve d’attraction pour la rejeter contre un mur afin de l'empêcher de pouvoir réfléchir avant de tenter de la terminer d’un coup.

Dans le même temps, Violette était en train de faire sa cueillette dans une pièce voisine, mettant une fleur dans un bocal qu’elle avait dans son sac. Tandis qu’elle l’y mettait avec une grande attention, une forme végétale apparaissait à côté d’elle, un nouvel avatar de la mandragore.

Pourquoi veux-tu tant cette fleur ? Contrairement à d’autres parties de mon organisme, elles ne valent et l’offrent presque rien.

C’est une mission, c’est tout. Je me fiche de savoir que tu offres de la force ou de l'immortalité.

La mandragore réfléchissait. Il n’y avait pas grand monde qui la connaissait. Encore moins qui savait précisément ce qu’elle était jusqu’à ces fleurs.

Qui a édicté cette mission?

Raneth’

L’ancien chef des maraudeurs. La mandragore fronçait les sourcils. Il lui semblait connaître son nom. Il était dans l’équipe du gnome de la dernière fois.

Je vois… je me rappelle de cette personne… Il va bien ?

Non, il est mort.

Ah… dommage… c’était un grand homme…

Violette se retourna vers la mandragore pour la regarder, yeux dans les yeux.

Je doute que tu puisses bien connaître mon mentor en une seule expédition qu’il a pu faire il y a des décennies. Donc plutôt que tenter d’avoir ma sympathie, dit moi ce que tu veux exactement. Je préfère les gens directs à ceux qui tournent éternellement autour du pot.

Tu as ta fleur. Je t’ai aidé, aide moi. Tes camarades sont en train de combattre le lycan. Aide les. Je ne peux pas mourir ainsi, je veux qu’ils gagnent, mais je ne sais pas s’ils pourraient en être capable seul, les lycans en furie sont si résilient par les rages qu’il est difficile de les mettre à terre définitivement, je dois maximiser mes chances de survie.

La maraudeuse souriait légèrement.

Tu te trompes quelque part chérie. La fleur c’est juste le contrat pour que je n’aide pas Feynor, pas pour que je me retourne contre lui. Si tu veux que je t’aide activement, il va falloir offrir quelque chose.

… et qu'est ce que tu veux exactement. Je n’ai rien que je puisse offrir à une maraudeuse ici.

Epargne les chèvres des sacrifices, c’est tout.

La plante semblait surprise, si bien que la xandrienne se crut obligée de préciser.

C’est fatiguant que ce soit toujours les mêmes qui trinquent c’est tout.

Très bien… mais je ne peux pas le faire définitivement. J’ai besoin de nutriment et épargner les herbivores signifierait dévorer des carnivores. Je ne peux pas changer un tel système seul, et tu ne peux pas prendre à toi seul 3 clans entiers de zoanthropes.

Et donc ?

Deux ans. J’accepte de stopper les sacrifices pendant deux ans. Tu as ce temps là pour revenir et tenter d’inverser les rôles pour briser la suprématie des loups, des ours et des aigles.

Violette soupira.

Va pour…

Mar 9 Avr - 22:13

La toréador

Violette - Duscisio


A peine le zoan se détournait-il d’elle que l’épieux de ronces traversa son poitrail. La stupéfaction est totale. Alors qu’Ellendrine esquisse une retraite rapide pour faire place nette au roncier, que les épines s’accaparent les membres de Feynor. Ses yeux arrondis de surprise laissent place à la hargne alors qu’il crache du sang sous les mots impérieux de Duscisio qui s’élève en pourfendeur.

Cela dit, même dans la cruauté, il conserve cette innocence propre à sa race. Pourquoi n’achève-t-il pas ce qu’il a commencé avant de parler avec la Mandragore ? La présomption de victoire lui sera fatale. Et si ce n’est à lui, du moins à elle, car Sangrépées cède à la bestialité pour transmuter ses chairs. Sa métamorphose en loup est gigantesque et monstrueuse.

Prise au dépourvue, Ellendrine voit le lycan fondre sur elle tout en étant projetée contre la paroi pierreuse, au cas où elle aurait eu des velléités de fuite. Son sac amorti moindrement les irrégularités des roches dans son dos. A dire vrai, elle se trouve bien démunie dans cette position, ne serait-ce que parce qu’elle a une constitution fragile et une armada de pouvoirs peu offensifs. A priori.

La croire perdue est néanmoins la sous-estimer grandement. En premier lieu, son mental ne se démonte pas devant la vague de terreur dans ses entrailles. Elle a réussi à mettre la main sur son totem avant d’être clouée. Si elle est écrasée par la gravité, son plan ne laisse d’autre choix qu’une attaque spirituelle.

Malgré la célérité de l’action, Violette peut sans doute discerner la scène en phases distinctes. L’archéologue tente une première prise de pouvoir sur Feynor par sa volonté brute. Mais elle a conscience de la finesse rudimentaire de son cristal de domptage, incapable de contraindre un tel niveau de bestialité venu l’occire. La deuxième phase voit le loup bondir dans les airs. Si elle est prête, elle se force à attendre l’ultime seconde pour matérialiser l’invocation devant elle. Non comme un bouclier, mais comme un bélier.

Les pattes arrières de l’exérus prennent appui sur la roche, de part et d’autre du corps d’Ellendrine, tandis que la tête de l’exérus vient encorner au dernier moment le loup blanc, juste sous la jugulaire.

L’artère principale avait été manquée. La douleur devait cependant être inexpugnable. Ellendrine commanda à l’invocation de se projeter vers l’avant en repoussant brutalement le mur. La corne du tigre s’enfonça un peu plus dans le loup, dont le corps fut rejeté en arrière. Tout en rage et en crocs, il s’en prenait mortellement à l’exérus, qui avait le mérite de ne pas être un réel organisme. Et de posséder de très nombreux bras pour entraver les pattes avant du loup.

Farouk saisit sa fenêtre de tir, une fois placé en position stratégique, où il optimisait ses chances de ne pas toucher ni Ellendrine ni Duscisio par tir direct ou par rebond. La mitrailleuse déversa une salve très ciblée sur l’articulation tibio-fémorale. Il était bien placé pour savoir que même une force de la nature n'irait pas bien vite ni loin avec un genou en charpie.

La cascade de détonations absolument assourdissantes sonna le glas de ce premier assaut, quand bien même l’exérus pissait le sang. A force de rage, Sangrépées avait fini par briser la corne de l’exerus, mais l’un des bras de l’animal s’était saisi de l’extrémité plantée. Ellendrine couvait Feynor d’un regard impérieux en menaçant de retourner la corne dans la blessure, encore et encore.

Elle avait glissé de la paroi pour retrouver le sol ; le loup n’ayant eu d’autre choix que de libérer son emprise psychique pour se débattre.
-« Vous êtes redoutable, Sangrépées… Légendaire, même.» observa-t-elle avec un froid méthodique, prête à réagir au moindre mouvement.
-« Mais vous contredisez vos propres préceptes. Est-ce là la marque d’un bon dirigeant ? »
A voir la pupille du loup s’agrandir, on sentait qu’il était réceptif à ses mots, en dépit de ses babines retroussées écumant de bave.

-« Pas plus tard que tout à l’heure, vous accusiez la Mandragore de ne s’en remettre qu’à la force brute. Quelle erreur que de faire de même, maintenant… comme beaucoup, vous avez commis l’erreur de me sous-estimer…

Sans doute auriez-vous gagné de toutes les autres manières face à moi. D’ailleurs, aviez-vous réellement besoin de vous battre pour gagner dans dans votre quête d'immortalité? J’aurais pu vous aider à récupérer le bien promis… même sans bulbe de Mandragore. Assurément, vos amis du Cercle vous auraient trahis… Comme vous devez regretter à présent… quel paradoxe : à fuir la mort, vous courrez dans ses bras…»


Feynor essaya de se jeter sur elle, mais un tendon de son genou en bouillie émit un craquement sordide.
-« Peste ! » gargouilla-t-il. Elle le fit taire, tandis que l’exerus aux allures de tigre blessé enfonçait la corne brisée d’un pouce vers l’intérieur de son torse tout en la faisant légèrement tourner. Elle contourna les corps pour s’éloigner.

Ellendrine dévoilait un visage aussi implacable que l’acier, là où elle n’exprimait d’habitude que tempérance et ouverture. Oui, elle était "vieille", ce qui signifiait aussi moins née de la dernière pluie face aux trahisons et tentatives d'assassinats.
-« Voyez-vous. Je suis en effet la plus faible de ce groupe. J’ai toujours été plus faible, même au sein de ma famille cannibale.

Et pourtant… je suis là… et… vous êtes à terre… votre propre force aura été votre pire ennemie, offerte sur un plateau pour devenir mienne ... et... vous transpercer… Pendant que vous perdiez votre énergie en déflagrations inutiles, je n’ai fait que concentrer la mienne. Car il suffit d’une aiguille bien placée pour tuer le dragon. »


A nouveau l’exérus pivota la corne tout en se faisant lacérer par les griffes du loup. Les fluides rouges qui s’écoulaient abondamment de son torse rendaient sa fourrure poisseuse et carmine. Mais ils ressemblaient plus à de la peinture qu’à du sang, tant le résultat de l’attaque paraissait nul sur l’invocation mourante. Décidément, elle ne lui pardonnait pas d’avoir voulu la buter en première.

« Vous qui êtes un homme éduqué et qui avez voyagé, laissez-moi vous rappeler - car nous sommes en territoire Xandrien - l’adage de cet éminent stratège militaire, Zu Suno : « Il faut feindre la faiblesse afin que l’ennemi se perde dans l’arrogance. »
Contrairement à lui, elle ne présumait pas l’avoir vaincu pour de bon, pesant sa progression sous le couvert de Farouk, tout en toisant autant que possible Violette et la Mandragore du coin de l’œil.
Un grand ramdam se faisait entendre.

-« On dirait que les ours ont hâté le pas avec le bruit des détonations… »

Jeu 11 Avr - 10:17



Temple des ours / Mont d'argent

Fanthret 1901



On serait loin d’imaginer que Duscisio puisse avoir la volonté de tuer.
Il n’a eu aucune hésitation à transpercer intelligemment le corps d’un être humain, un point vital, sans le moindre remord. Cela ne serait-ce pas là le premier danger ? Un parfait sang froid comme s’il écrasait un simple nuisible de son pied. S’il n’achève pas le vieux loup, c’est qu’il n’en avait pas l’intention. Il a bien précisé dans une discussion avec la mandragore qu’il voulait seulement le neutraliser. De son point de vue, le corps humain est suffisamment fragile pour ne plus pouvoir agir dans cet état. L’objectif est donc bien rempli et se permet de donner une leçon de vie avant de questionner sa congénère sur sa condition de vie dans les montagnes. La mandragore qui répond à ses questions dans une ignorance totale. On demande parfois pourquoi on est né. C’est en vivant que l’on cherche une raison de vivre ou une simple volonté de vivre pour répondre à cette question existentielle. Puis c’est au tour de Violette, sa mission ne concernait qu’une fleur. Elle l’avait précisé ? Il a oublié, mais cette réponse lui convient, si ce n’est que la mandragore souhaite négocier avant qu’un problème revienne à la charge.

Il s’agit de Freynor, qui est visiblement toujours vivant. Plus grand, plus fort, plus poilu. Coupant les ronces et donc leur contrôle, on pourrait y croire à une contre-attaque sur l’élémentaire lui-même, mais il n’en est rien. Duscisio tente bien de lui envoyer quelques tiges épineuses. Même en étant entrelacé, elles ne seront jamais assez solides contre cette force brute. À la place, Ellendrine est prise pour cible. Duscisio aurait bien voulu agir, mais la différence de force lui montre son incapacité à pouvoir aider la jeune femme. Est-elle vraiment sans défense ? Son compagnon de route armé d’une arme à feu ne saurait être inactif. Sans compter qu’elle a gardé secret une belle invocation d’une créature propre à l’arbre-dieu dont Duscisio pourrait s’entre à merveille par sa caractéristique de mettre à mal toute machine à proximité. Ici utilisé sous sa forme la plus féroce, le soutien de Farouk lâchant une série de coups de feu dans le genou du vieux loup. Sans mobilité, le voilà condamné.

Ellendrine fait l’étalage de sa faiblesse qu’elle a su exploiter pour vaincre en donnant une petite leçon orale à son adversaire. Si certains propos ont porté une énorme confusion à Duscisio sur la nature de sa famille, un vacarme assourdissant et une conclusion hâtive conclut que les ours seront là d’une minute à l’autre.
Du côté de Violette, la maraudeuse négocie avec la Mandragore. À la fin de celle-ci, Duscisio se manifeste en marchant à leur proximité. Alertés par l’arrivée prochaine des ours, il énonce calmement.

— On va avoir de la visite.

Secrètement, la télépathie sylvestre entre lui et la mandragore fait étalage de l’énergie qu’il lui reste. Le climat et les efforts fournis l’affaiblissent et les quelques roses blanches restantes commencent lentement à geler. Fermant les fleurs encore présentes, couvrant sa tête de la capuche pour les maintenir au chaud. Même s’il lui reste encore les ronces le long de nombreuses racines, l’élémentaire préfère s’économiser.
Dans le même temps, elle lui partage l’accord avec la maraudeuse pour ne pas la faire répéter. S’il a bien entendu, elle s’abstiendra pendant deux ans du sacrifice des chèvres. Sans dire un mot, le regard se porte vers Violette. Aucun sourire, rien, mais son regard porte à croire qu’il a une certaine sympathie pour ce geste.

— Nous aurions potentiellement besoin de cet accord pour négocier avec eux. Vous êtes avec nous, mademoiselle Mandragore ?

  Avec son approbation, Duscisio retourne auprès d’Ellendrine, plus précisément sur le corps de zoanthrope. Ce qu’il cherche ? Les cristaux de pouvoir qu’ils possédaient. Non seulement pour les rendre, mais également pour témoigner de sa défaite en tant que chef par son égoïsme. Sans oublier qu’avec les ours qui arrivent, un coup de pouce de la part des cristaux ne serait pas de trop. Même s’il veut économiser ses forces, Duscisio pourrait très bien les utiliser comme force de dissuasion sans prétendre en avoir une parfaite maîtrise. Les deux cristaux blancs recouverts tous les deux d’une belle décoration de bronze montrant qu’ils sont tous les deux purifiés se trouve maintenant dans ses mains.

— Nous allons avoir besoin de ça. Dit-il à Ellendrine sans émotion.

Comble de la situation, la mandragore aura pour don un corps de son premier carnivore. Elle pourra leur dire quel goût ç'a une fois la confrontation avec les ours terminée..  

Sam 13 Avr - 17:50

Aide moi...

Ellendrine - Duscisio




Et bien…

Les racines cachant la porte s’écartèrent de nouveau pour laisser passer la maraudeuse qui avait sous le bras un bocal dans lequel était placée une fleur d’une couleur cristalline.

Je vois que vous avez bien géré la situation.

Tout en se rapprochant, elle enjambait quelques débris en inspectant le corps de Feynor. Il était à terre, définitivement, mais pas encore mort. Après tout, les zoantrophes étaient bien réputé pour être solide. Malheureusement pour lui, il n’était pas dans le bon environnement pour exprimer tous les avantages du loup en matière de vitesse et d’agilité.

Si vous voulez le tuer faîtes. C’est votre histoire, cela ne me concerne pas.

Il n’y avait pas à avoir de fausse solidarité ou de fausse compassion entre les membres du groupe. Chacun était là pour ses propres intérêts, cela s'arrêtait là. Le loup c’était leur combat, pas le sien. Tant qu’elle même réalisait sa propre mission, tout le reste était secondaire.

Ceci dit, son regard finit par s’arrêter sur l’élementaire qui disposait des cristaux du loup alors qu’elle entendait les ours s’approcher.

Cache ça. Inutile de provoquer ou de susciter plus de méfiance que nécessaire en montrant de telles armes.  Évite également de ne serait ce que penser utiliser le cristal d’attraction. Sans entrainement et expérience, ce pouvoir surtout à ce niveau c’est une manière très simple de se suicider.

User de télékinésie à l’instinct passait encore, du moins pour les choses qui peuvent être classifiées de simple à faire. En revanche l’attraction était un pouvoir bien plus piégeux parce que par défaut il influençait tout à sa portée. C’est par l'entraînement et l’expérience qu’un utilisateur parvenait à sélectionner ses cibles par une maîtrise chirurgicale des flux gravitationnels. Autant dire qu’à moins d’avoir un talent exceptionnel et une chance inouïe, ce n’était pas le genre de chose que l’on pouvait réussir du premier ou du deuxième coup. Posséder un pouvoir était une chose, savoir le maîtriser en était une autre. C’était ce qui distinguait les différents niveaux d’utilisateurs dont les pouvoirs étaient du même stade.

Il ne fallut en tout que quelques minutes de plus pour que des ours parviennent jusqu’ici. Et ils étaient nombreux, au moins une dizaine sous forme humaine. Et même sous cette forme, c’était des colosses, aucun d’eux ne faisait moins de 2 mètres.

Celui qui semblait être le leader du groupe s’avança, un regard fier et haut mais aussi assez méfiant face à des inconnus aussi profond sous terre. Il posa alors son attention sur Feynor au sol en sang avant de parler.

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Qui êtes vous ? Qu’est ce que c’est que ça ?

La voix était autoritaire.

Demandez à la mandragore. Vous la croirez plus que nous.

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Cette dernière avait fini par reformer un nouvel avatar, celui-ci était différent du premier. Dans l'apparence, la posture et même la voix. A croire qu’elle s’adaptait vraiment à ses interlocuteurs. Tout à l’heure son apparence était plutôt adapté aux us de la féminité du point de vue de ceux de la surface, où dans le paternalisme patriarcale propre à Xandrie et dans une moindre mesure ses voisines, la femme se devait d’être émotive et à protéger, tout en ayant des formes et un respect des conventions qui appelait au désir. A l’inverse, la perception de la beauté de la part du clan des ours était différente. La beauté ne pouvait en aucun cas de l’émotion ou de la faiblesse même supposée. Seules comptaient la force et la musculature, autant pour les hommes que pour les femmes.

A croire que la Mandragore n’était au final pas aussi faible que le pensait Feynor à la base… S'était-elle laissée faire volontairement ? Mais pourquoi ?

Une question actuellement sans répondre… Quoi qu’il soit avant même de répondre à l’ours, la plante regarda un instant Violette puis Duscisio. Se serait mentir que de dire qu’elle n’avait pas considéré en cette instant de les trahir et de les laisser se faire massacrer par des salves d’ours. Après tout, des concepts comme la loyauté, l’honneur ou l’amour étaient déterminés par les hormones et les réactions chimiques afin de favoriser la survie et la procréation des espèces qui vivaient instinctivement en meute ou en groupe comme c’était le cas des humains. La mandragore était une race solitaire, elle ne ressentait pas biologiquement ce genre de chose. Mais était-ce aussi simple ? L’âme était-elle nécessairement déterminée par le corps et la biologie ? Un grand sujet de science et de philosophie.

La plante avait posé ainsi le pour et le contre, mais elle avait jugé qu’elle perdrait sans doute plus à les trahir. Après tout, l’élémentaire lui donnait quelques curiosités et de toute manière l’intangibilité de la maraudeuse rendait le problème difficile à régler facilement.

Feynor nous a trahi. Eux… ils sont avec moi.

D’accord.

L’ours fit un geste de déférence vis-à-vis de la divinité locale.

Et que devons nous faire d’eux ?

Une fois qu’ils auront ce qu’ils sont venus chercher. Aidez-les à revenir par chez eux. Au-delà des montagnes.

La mandragore se tourna vers Violette.

Vous, vous avez ce que vous cherchez j’imagine.

La maraudeuse hocha la tête.

En effet.

Puisque Duscisio à sa manière était en courant de ses intentions, il pouvait trouver étrange qu’elle ne fasse rien. Elle ne semblait même pas avoir l’intention de combattre. En réalité, la raison était fort simple. Si le taux de survie des maraudeurs était infiniment plus élevé que celui de la part des autres corps armés c’était pour une raison simple. Un maraudeur ne faisait que rarement quelque chose dont le risque était trop élevé. Lorsque cela arrivait, c’était principalement parce qu’il avait sous estimé ses adversaires, comme ce fut le cas de Violette au prix d’un œil. Combattre les ours était à ses yeux trop dangereux au point que ce n’était même pas une option à ses yeux. Même sans cristaux, il ne s’agissait pas de simples humains. Même avec une force de frappe supérieure, son énergie vitale serait consommée avant même d’avoir pu finir le massacre.

Elle avait forcément une idée derrière la tête pour accepter de défier trois clans en même temps. Néanmoins, qui disait qu’elle le ferait pendant ce voyage et pas un autre ? Le maraudeur n’aime pas le risque, s’il acceptait un truc pareil, cela signifiait qu’il savait très bien ce qu’il faisait et ce qu’il allait faire. Et surtout, qui il allait frapper.

Ignorante de tout ce qui pouvait se passer dans la tête d’une xandrienne au visage éternellement fermée et grognon, la mandragore passait à Duscisio et Ellendrine.

Et vous. Que voulez vous déja ?

Mar 16 Avr - 22:27

Résolution pacifiste

Violette - Duscisio


A la fin de son laïus, un profond soupir de soulagement libéra la poitrine d’Ellendrine. Trop longtemps, patriarche, frère, sœurs, notables et industriels avaient cru pouvoir lui passer sur le corps et lui forcer la main de bien des manières. Que ce soit par l’esprit, jusque dans ses convictions intimes ou la marchandisation de son corps par des tractations matrimoniales ou un patriarcat rampant, c’était trop. Trop de viols de différentes natures. Trop de mépris quant à sa condition de femme ou d’intellectuelle. Comme si ces conditions étaient des gros mots.

Prendre au dépourvu son assassin lui était un véritable exutoire. Toujours en vigilance orange, elle observe avec étonnement Duscisio s’approcher de Feynor et le délester de ses cristaux. Elle n’aurait pas osé réduire la proximité physique avec le zoanthrope, même ainsi diminué. Une seule balafre lui aurait été fatale. Mais Duscisio était-il fait de chair et de sang ? Ainsi, c’est plus de la surprise que de la désapprobation que l’élémentaire put rencontrer dans son regard.

Les voila soulagés d’avoir à le désarmer. Violette reparaissait avec son Graal. Une moue dégoûtée la traversa quand la maraudeuse évoqua l’élimination de Feynor.

-« Il n’y a rien de pire qu’un animal blessé privé de ses rêves de gloire… mais je préfère le livrer aux ours qui lui réserveront sans doute une punition fatale. »

Le pronostic vital de Feynor était engagé, ou peut-être pas. Sa constitution exceptionnelle rendait peut-être la guérison possible avec des soins. Mais elle n’était pas une meurtrière. Si elle l’avait ainsi mutilé, c’était avant tout pour sauver sa peau et contrer l’absolutisme de Sangrépées sur sa personne.

Un voile de convoitise discret glissa sur les cristaux. Elle en aurait bien offert un à Farouk en récompense de ses loyaux services et de son amitié depuis des années. Son entraînement martial sur le plan mental et spirituel lui permettait sans doute de se forger rapidement une belle maîtrise de ces armes.

Ils se retrouvèrent à patienter jusqu’à l’arrivée des hommes-ours. Imposants de carrures, ils imposaient le silence. Dès l’arrivée des zoanthropes, l’invocation d’exérus s’évanouit. Ellendrine retrouva son poste d’observatrice en laissant la maraudeuse parlementer. C’est alors qu’elle remarqua la nouvelle silhouette de la Mandragore, bien plus guerrière et fière. A son avis, elle était bien plus belle en ayant cet aspect. Le temps d’un silence, la Mandragore toisait Violette et Duscisio.

L’Aramilane ne concevait pas l’avantage qu’elle tirerait à les trahir, elle ou Duscisio. En revanche un coup de théâtre était possible pour Violette, qui lui avait extorqué « l’une de ses filles. » Mais peut-être la considérait-elle trop imprévisible pour la défier alors qu’elle avait survécu à Feynor.

Tout avait l’air de bien se terminer finalement. La Mandragore se tournait à présent vers eux d’un air qui semblait las et détaché. C’était le temps d’affirmer leurs gains. Mais peut-être qu’il ne fallait pas se montrer trop gourmands. La plante n’était pas obligée de toutes les accepter.

-« Eh bien, le fait d’être sains et saufs est déjà un cadeau. J’ai obtenu pas mal d’informations géographiques recherchées. En bref, je voudrais formuler trois demandes :
Premièrement, récupérer l’un des objets de mon choix parmi ceux que Duscisio a récupéré ;
Deuxièmement, un sauf conduit pour être autorisée à revenir lors d’un voyage d’étude dans des circonstances plus tranquilles ;
Enfin et surtout, des informations sur les contacts de Feynor que je souhaiterais rencontrer à la caverne du Pic Ardent. »


Ellendrine hésitait à se montrer trop directe. Il aurait été plus favorable de mener cette conversation à huis-clos en l’absence du clan des ours, dont certains membres pouvaient avoir des liens avec le Cercle. Pour cette raison, elle n’osait faire mention du nom de l’organisation, ni clarifier son positionnement par rapport à elle. Ici, elle ne faisait montre que d’un vif intérêt.

-« Sinon, ce sera tout. Je vous remercie. »

A l’adresse du meneur des Ours comme de la Mandragore, elle interrogea :
« Que comptez-vous faire de lui ? »


Dernière édition par Ellendrine Brightwige le Mer 17 Avr - 15:08, édité 1 fois
Mer 17 Avr - 11:36



Temple des ours / Mont d'argent

Fanthret 1901



S’ils étaient dubitatifs pour le sort de Feynor, chaque jeune femme avait sa vision concernant le vaincu. Si Violette n’avait guère d’intérêt, la cartographe veut le livrer aux ours. Quant à Duscisio :

— Je suis du même avis. Les ours et la mandragore sauront très bien le juger…

Il approche de Feynor sans craindre pour sa vie. Même étant gravement blessé, se relève à prendre un énorme risque. Il n’était pas nécessaire de l’emprisonner. Dans des racines au mieux, vu que ses ronces n’ont pas résisté longtemps à sa force, mais pour s’approcher autant sans rien craindre, Duscisio devait avoir une sorte d’inconscience aux yeux de ses compagnons de voyage. Comme s’il n’avait nullement peur de se prendre un mauvais coup de sa part. Le contraire n’était pas totalement inexistant non plus. Il est toujours connecté avec la Mandragore, elle pourrait très bien utiliser ses racines pour l’achever s’il venait à lever la patte. Acte mesuré ou inconscient, il serait bien difficile de savoir pourquoi Duscisio a autant confiance pour s’approcher de si près, néanmoins il fallait au moins le désarmer des cristaux de pouvoir. L’élémentaire étant le moins concerner par de grave blessure – ou simplement qu’il ne craint pas d’être attaqué – il cherchera les deux sphères blanches sur le corps du vaincu. Alors qu’il ramasse les deux cristaux, l’un étant vivifié, Violette est prévoyante en l’avertissant du danger du cristal purifié de la télékinésie.

— Je suis au courant. Autre ma curiosité d’essayer, ce pouvoir est bien trop offensif pour moi. Dit-il d’un ton désinvolte. Je laisserai ses cristaux à l’un des trois camps.

Il ne compte effectivement pas les prendre avec lui. Bien que cette télékinésie pourrait bien l’intéresser, sa nature peut permettre de s’en passer. Un pouvoir trop offensif. Témoin de ses actes précédents, ses pouvoirs raciaux le sont bien assez. Même diminuer par le climat, il a fait preuve d’une force d’esprit dissuasive en se permettant de se connecter et de propager ses ronces à une telle envergure aussi rapidement. Au vu des préparations faites avant de monter, on peut s’estimer heureux qu’il soit encore éveillé malgré tout. Il ne lui reste plus beaucoup de force et il se les réservera pour descendre. Enfin, en espérant que les ours ne soient pas trop agressifs. Mais si on témoigne du temple à l’intention de la mandragore, celle-ci devrait être en sécurité et eux aussi vu que Duscisio a cherché à la défendre.

Rien qu’en pensant à leur rencontre, les voilà comme prévu. Il n’est pas très compliqué de les reconnaître. Non seulement leur carrure s’apprête à celle d’un ours, mais leur fourrure les trahis par leur présence. Même diminué à quelques épaisses couches sur les épaules pour celui qui d’un ton autoritaire demande qui ils sont et pourquoi Feynor était ici dans un piteux état. Violette, dans un éclair de lucidité, préfère leur répondre de demander à leur déité locale. Guère impressionné, Duscisio reste silencieux en s’éloignant du vieux loup à l’agonie. La mandragore crée un nouvel avatar face aux ours, bien différente de celle qu’elle a montrée pour Duscisio. La première apparence aurait été créée à l’image des plus plaisantes pour l’élémentaire. Pour les ours, elle était bien plus humaine, bien que son corps soit uniquement constitué d’un bois sombre et robuste. Répondant à leur faveur, la mandragore évite le moindre conflit. Par le biais d’un acte de paix, l’élémentaire s’avance vers eux, les deux cristaux bien visibles en ne montrant aucun signe d’agressivité. Violette ayant ce qu’elle voulait, les guider jusqu’en bas pour avoir résolu la trahison serait le minimum que l’on pourrait demander. Malgré tout, l’avatar leur demande ce qu’ils voulaient en échange de leur aide.
Ellendrine est un peu plus envieuse. En plus d’être contente d’être en vie en plus de donnée géographique, elle désire l’un des cristaux que son compagnon de route a ramassé en plus du droit de revenir. Le troisième point attise la curiosité de Duscisio ne saisit pas tout, passant de loin à lui demander quelques détails pour comprendre.

— Rien de spécial. Je suis déjà heureux d’avoir rencontré une mandragore. En tant qu’élémentaire et herboriste, savoir qu’il en existe une dans ses montagnes me comble bien assez.

L’élémentaire s’arrête à répondre à la mandragore en approchant d’Ellendrine pour qu’elle choisisse le cristal convoité.

— Je ferai en sorte d’en savoir un peu plus sur votre espèce et ce qu’il reste d’archives vous concernant. Je pourrais en rencontrer d’autres à l’avenir. Si je peux rejoindre la jeune dame et vous rendre visite, je vous partagerai ce que j’ai appris.

La mandragore a avoué d’elle-même ne pas savoir pourquoi elle se trouvait là. Et pourquoi ne pas sortir de son confort pour l’aider ? Avec l’accord de Violette, il avait deux ans pour en apprendre un peu plus. Ne serait-ce qu’une petite information. Rencontrer une autre mandragore pourrait par contre bien prendre des années voir des siècles. Par cette proposition, qui s’ajoute avec le voyage à l’Arbre-dieu, Duscisio vient à lui-même vouloir sortir de Doucerive qui lui a apporté une vie bien tranquille ses dernières dizaines d’années.
Le cristal qui lui reste dans les mains demeure sans propriétaire. Faut-il le rendre au camp des loups ? Le donner aux ours ou à la mandragore ? Il pose la question un peu à tout le monde, en silence, son regard suffit à les questionner. Tout étant que l’acquisition d’un nouveau cristal pourrait lui être grandement utile, encore faut-il qu’il puisse choisir.

Jeu 18 Avr - 20:15

Conclusion

Ellendrine - Duscisio




L’ours était méfiant et il le faisait savoir par sa posture. Contrairement aux loups qui étaient sournois et aux aigles qui étaient trop dignes pour laisser paraître la moindre émotion, les ours ne cachaient rien. Que fallait-il cacher quand on était tout puissant ? Il était sur que sans cristaux, personne ne pouvait physiquement si ce n’était les saraph prendre au corps à corps ces montagnes de muscles.

Enfin bon, si la mandragore, plante divine, le disait. Ce n’était pas son rôle de contester ses directives. C’était elle qui était à protéger après tout. Plante mystérieuse aux origines et à la nature encore indiscernables.

Celle-ci dans un premier temps était concentrée sur Ellendrine qui avait pour elle plusieurs demandes. Malgré l’air imperméable qu’elle avait, la mandragore lui répondait rapidement sans même hésiter une seconde.

Fort bien, prenez ce cristal. Prenez les tous. Je ne veux pas de ce genre de choses sur mes terres. Faites en ce que vous voulez.

Elle ne semblait avoir aucun intérêt pour les cristaux et les pouvoirs. En tant que race naturellement puissante, sans doute trouvait-elle ça ridicule de compter sur les pouvoirs d’un autre et surtout d’une force mystérieuse et inconnue. A ses yeux ces choses étaient plus des problèmes qu’autre chose, car il s’agissait d'armes que tout le monde pouvait retourner contre elle. En étant généreuse avec l’opaline, elle servait avant tout ses propres intérêts.

En ce qui concernait la suite, c’était peut être plus complexe que prévu.

Certes… Vous pouvez revenir si vous le désirez… Néanmoins je préfère vous prévenir que les choses seront plus complexes lorsque vous reviendrez…

Son regard se tourna vers Feynor inconscient.

Les loups ne sont pas une espèce habituée à baisser la tête après la chute du chef de meute. Des trois clans, c’est celui avec l’esprit solidaire le plus féroce. Lorsqu’ils apprendront la nouvelle, des conflits vont éclater et qui sait ce que serait la réaction d’Aeria la matriarche des aigles. Autant dire que vous ferez partie des cibles d’une potentielle vengeance de leur part.

Cette histoire ne se terminait pas là. Elle n’était que le début de quelque chose. Les conflits dans un monde aussi hostile que les hautes montagnes ne pouvaient être des batailles rangées. On parlait d’embuscade et d'escarmouche perpétuelle. Il y aurait des morts, il y aurait du sang. Ce n’était pas pour déplaire à la mandragore, seul monstre bénéficiaire d’un monde jonchée de cadavres et gorgée de sang.

Le second voyage serait encore plus difficile et dangereux que le premier. Au danger de l’inconnu se substituerait celui de la violence, de la haine et du désir de vengeance.

Comprenez toutefois que je ne connais que peu les affaires de Feynor et que je ne suis pas omnisciente. Je ne sais pas vraiment d’où il tient ses informations sur moi… Peu de gens connaissent les secrets de ma structure…. Bien que j’ai ma petite idée sur la question. Il y a bien une personne que j’ai en tête mais il sera difficile de le trouver, je ne sais pas où il est actuellement. Peut être en bas. Peut être en haut. Tout ce que je peux vous dire à son sujet c’est qu’il est plus vieux que moi et appartient à l’espèce qui a des ailes dans le dos. A la différence que lui, on lui a arraché les ailes et qu’il ne lui reste plus que les moignons sur le dos… C’est tout ce que je peux vous dire.

Quant à lui…


La plante se tournait vers Feynor.

Nous allons le garder avec nous pendant un moment. Mort, il ne sera qu’un martyr pour les loups. Malgré ses actes, il a plus de valeur… vivant.

On verra la prochaine fois.

Jusqu’ici silencieuse, la maraudeuse toujours avec son bocal reprenait les paroles.

En cas de second voyage il faudra mieux se préparer, cela risque d’être plus dangereux on a comprit.

Elle se tournait vers ses trois camarades.

Je ne sais pas ce que vous voulez faire. Du tourisme, de l’étude scientifiquement ou de la pure curiosité, mais de mon côté je ne peux pas traîner avec ce genre de fleur coupé. Libre à vous de repartir avec moi ou de rester ici.

La plante hocha la tête.

Montez au village des ours. Vous aurez le droit de vous reposer. Ils vont indiqueront le chemin le plus rapide et sécurisé pour redescendre.

Parfait.

Elle tourna les talons pour remonter. Cette histoire avait son intérêt mais l’esprit de la xandrienne était déjà ailleurs, totalement dirigée vers les intrigues de sa propre guilde. Elle n’avait pas le loisir de se disperser.

Elle resterait ainsi la nuit, avant de repartir en compagnie des volontaires pour un voyage bien plus simple bien que physique qu’à aller pour filer tout droit à Xandrie en vitesse grand V pour son sprint final.

Mar 23 Avr - 19:13

Epilogue xandrien

Violette - Duscisio


Le clan des Ours n’avait pas l’air de s’ingérer dans les affaires de leur divinité. La Mandragore pour sa part avait pris son parti de ne pas les tourmenter. L’équipe de Violette s’en tirait donc à bon compte pour cette aventure, au détriment de l’infâme Feynor. Toujours vivant, il haletait. Son teint avait viré au gris. Le trou laissé par la corne d’exerus au-dessus de son cœur béait, exsudant une mousse bulleuse de sang ayant pour origine la fuite d’air de son poumon perforé. Mais le félon s’accrochait à la vie.

Avec une satisfaction froide proche du sentiment de revanche, l’aristocrate saisit les deux cristaux appartenant au loup de sa main gantée. C’était grande surprise que de voir Duscisio ne pas les revendiquer. Plus encore de voir Violette laisser échapper des gains supplémentaires. Ces artefacts antiques étaient rarissimes. Si elle comprenait que la plante prédatrice préfère ne pas voir ses ouailles équipées de pouvoirs mortels qu’ils pourraient retourner contre elle, si leur allégeance vacillait, elle ne concevait pas que la Mandragore se prive de l’exercice d’une telle suprématie.

C’était là leur choix à tous. Ainsi s’empara-t-elle sans combattre du cristal vivifié d’attraction, pour le compte de Farouk. Et de celui de télékinésie. Elle le remettrait peut-être à l’Alliance pour arrondir les angles et favoriser une éventuelle collaboration. Le monde changeait drastiquement. Il fallait être prêt à surfer sur la vague et se libérer des dogmes restrictifs. Pour que sa parole soit entendue et son savoir utile, elle devait se préparer stratégiquement à la bataille de Zénobie.

Ellendrine hocha de la tête en signe d’assentiments pour les conseils de la Mandragore. Elle allait bien au-delà de ce que l’on aurait pu attendre d’elle dans sa position. On aurait presque pu prendre cela pour de la considération. Ainsi, un retour serait sous le signe des hostilités. Le clan des Loups se remettrait de la détention de son dirigeant. Il survivrait. Cependant, la chercheuse connaissait encore trop peu de choses à l’endroit des autres peuples zoanthropes. Le clan des Ours était à peine effleuré. Celui des Aigles et de la matriarche Aeria restait un mystère. Quant aux herbivores, les données étaient plus que limitées. Elle se demandait si cela vaudrait la peine de se lancer dans une quête parallèle par les temps qui couraient.

Un sujet de recherche aussi iconoclaste pouvait avoir de l’allure. Qui aurait deviné qu’une civilisation si exotique pouvait se dissimuler en plein milieu de Xandrie ? Si elle revenait, elle reviendrait mieux préparée. Mieux armée.

-« Merci, Mandragore. Vos conseils sont précieux et appréciés à leur juste valeur. » dit-elle sobrement, ne sachant pas le protocole que les Ours prévoyait pour saluer leur déesse.
*
A l’adresse de Violette, elle répondit :
« Je pense qu’il vaut mieux ne pas s’attarder plus longtemps. Nous ne venions pas préparés à des guérillas ou à une guerre civile, dans des monts réputés déserts. La science a déjà beaucoup à faire avec les données récoltées, que je dois par ailleurs mettre en sécurité. Rentrons ensemble rapidement à Xandrie pour y récupérer notre récompense. » proposa-t-elle en incluant Duscisio à son raisonnement.

Elle savait le vent changeant chez les maraudeurs et trouvait abominable l’idée de ne réclamer son amplificateur de dextérité que dans le futur.

L’archéologue profita du repos offert pour la soirée. Des bains chauds leur avaient été offerts gracieusement. Ce fut aussi l’occasion d’observer les us et coutumes des habitants du village. A bien des égards, ils ressemblaient à ce qu’elle avait pu apercevoir chez les loups. Elle observait toutefois quelques différences notables dans le comportement des enfants et se permit de poser quelques questions à ces derniers. Ils étaient peu disserts mais leur attitude était moins glacée que celle des adultes.

Le voyage du retour était plus tranquille, car ils n’avançaient pas à l’aveugles sur un itinéraire vierge de tout tracé, mais sur recommandation des Ours. La descente n’en fut pas moins sportive, même si la pression dans l’air se réduisait à mesure qu’ils s’éloignaient de l’épicentre du conflit. Ellendrine crut discerner au loin une escadrille d’Aigles couvant leur départ.

Violette allait bon train. Parfois difficile à suivre, elle laissait peu de place aux conversations. Une fois parvenus à un paysage plus vallonée, l’air redevint respirable. Cela lui donna l’occasion d’offrir à Duscisio de lui payer un billet de train entre Xandrie et Opale. Il pourrait descendre à Oman, ce qui raccourcirait considérablement son retour vers Doucerive.

Elle testa le terrain en glissant quelques mots à Violette sur le Grigori mutilé, la grotte du pic Ardent et le XIIIème Cercle, augurant une quête proche des Monts d’Argent qui pourrait s’allier à la sienne si elle décidait d’y retourner. Une animosité sans mélange de la maraudeuse vis-à-vis du XIIIème Cercle jaillit avec évidence. Sans doute un enjeu très personnel.

Avant de se quitter aux abords de Xandrie, elle serra poliment la main de Violette qui avait honoré sa part du contrat. Espiègle, elle profita de cette occasion unique de voir que quel bois était fait la future cheffe de la guilde des maraudeurs.
-« Bon vent à vous Violette. Il semblerait que vous ayez gagné. Peu de concurrents ont osé se mettre sur votre route dans le guêpier du conflit zoanthrope. »

Un bref instant, son regard aux couleurs de la forêt se troubla. Elle laissa déferler en elle l’éclair de la Cognition. La brièveté du contact ne voulait pas attirer de suspicion vengeresse. Aussi se laissa-elle imprégner par la charge émotionnelle récente la plus évidente. L’expérience qu’elle déployait accentua l’acuité de l’immersion, jusqu’à ce qu’Ellendrine ait l’impression de passer du statut d’observatrice tapie dans l’ombre à Violette elle-même.

La mercenaire se tenait dans une solitude absolue face à une pierre tombale des plus épurées. Elle portait le nom du défunt chez de la guilde des maraudeurs. Sans doute père de substitution, il laissait sa protégée face à sa dérive intérieure. Une bouteille d’alcool roula sur le sol cabossé. Le barillet vrilla dans le revolver, alors qu’elle était prête à se tuer. Dans sa fermeté, le personnage paraissait étrangement vulnérable. A cet instant, on ne voyait plus une maraudeuse, juste une femme perdue et brisée de ses incohérences. Elle pointait le canon de l’arme sur sa tempe, prête à en finir.

Ellendrine reconnut la petite créature végétale qui servait de familier à Violette. Elle lui tirait la manche et lui parlait avec animation de mots dont elle ne put saisir la teneur, car elle était déjà partie assez longtemps. La vision se dispersait.

Il est toujours délicat de procéder à une lecture sur une personne. Pas très éthique de le faire sans son consentement. C’estlà son arme à elle pour éviter d’être prise à revers par les circonstances… Sans savoir ce qu’elle ferait de cette bribe de vie volée, elle la rangea sous clef dans son esprit.

Un peu gênée, elle s’en alla avec Duscisio dans l’imposa bâtiment qui servait de quartier général à la guilde des Maraudeurs. Bien étrange impression que de voir une organisation semi-criminelle avoir pignon sur rue en tant qu’institution. Passer par leurs protocoles de sécurité, de fouille et d’identification. Devoir montrer patte blanche et passer au nascent de polygraphie pour démontrer son nom et l’accomplissement de sa mission lui permit au moins de récupérer prestement un cristal de domptage vivifié.

Ne lui restait qu’à rester en sécurité et profiter un peu de la capitale xandrienne où elle venait peu souvent. Peut-être qu'une pièce de danse dramatique se jouerait sans l'un des palais? Le train express pour Opale ne partirait que le lendemain.
Dim 28 Avr - 11:49



Xandrie / Capitale

Fanthret 1901



En effet, les ours sont là pour protéger la mandragore. Ces derniers ne semblent pas en droit de contester ses paroles, comme une divinité locale, à contrario de son régime alimentaire qui va quelque peu changer ses deux prochaines années. L’accepteront-ils ?
À défaut de pouvoir prononcer un mot de plus, l’élémentaire met fin à la liaison avec la mandragore qui leur a servi à communiquer et à affronter un ennemi commun. Les ronces qui les connectent sont brisées. Les nombreuses tiges qu’il a propagées ici et là restent accrochées. Sans support de leur source, elles dépériront naturellement tout en accompagnant la plante divine pendant quelques jours. Puis il s’approche de qui ressemble le plus au chef des ours. Si leur clan est son bouclier, autant lui donner un petit plus pour la défendre. Même si cela ne leur parait pas utile, le cristal purifié de télékinésie leur est tendu presque à contrecœur.
Leur affaire est terminée ici. Feynor sera traité comme il se doit et Violette a accompli sa mission. Ellendrine possède ses cartes et un droit au retour. Et Duscisio ? Il se contente vraiment de peu. Connaître l’existence d’une mandragore, même dans un endroit aussi reculé, est déjà un grand trésor. Pourquoi étudier l’espèce à travers Astrebrume va lui prendre quelques années, comme il le fait déjà avec des milliers d’autres plus communes. Demander l’une de ses graines serait de trop à ses yeux. Et puis, elle a déjà donné une fleur alors qu’il s’y refusait, ainsi son travail est terminé.

En se dirigeant vers le village des ours, ils purent se reposer. Duscisio un peu plus difficilement à cause du froid et de ses réserves. Il ne resta qu’à demi-éveiller pour ne pas passer ses prochains jours à être un fardeau le temps de la descente pour retrouver des températures un peu plus fraîches. Direction Xandrie. Comme affirmé par la cartographe, leur récompense leur sera attribuée là-bas.
Chez les maraudeurs, la récompense est donnée. Ce cristal est totalement blanc, seules trois décorations dessus permettent d’en connaître la valeur. Pour ce qu’il donne, il ne se fait qu’à l’essai. Essai qui est très vite assuré par son utilisation précipitée d’une attaque et d’une défense réflexe de son nouveau propriétaire. La barrière d’énergie qui s’est matérialisée n’avait rien d’extraordinaire. Dépourvue d’une forme précise, elle fut suffisante pour arrêter une simple balle qui a été tirée volontairement avec un avertissement pour prouver leur bonne foi. C’est un peu brutal, mais Duscisio les en remercie.
Ellendrine dans un geste de bonté, lui offre un billet de train pour se rendre à Opale, lui permettant de regagner son domicile plus rapidement. Il refuse gentiment.

— Non, merci. J’ai l’intention de vadrouiller un peu pendant plusieurs semaines. J’ai… quelques achats à faire en plus de quelques expériences… Ce voyage m’a permis d’y reprendre goût.

C’est inattendu de sa part. L’hiver est loin d’être terminé et les expériences le concernent directement. S’il a supporté des températures assez extrêmes dans les montagnes, faire le trajet avec les quelques outils qu’ils possèdent ne devrait pas être compliqué. De plus, il y a des plantes qui ne poussent qu’en cette saison. C'est une occasion d’en voir et d’en récupérer quelques graines. De plus, il n’est plus totalement sans défense. En cas de nécessité – et aussi parce qu’il s’y intéresse depuis fort longtemps – il a besoin de savoir comment cela fonctionne. En plus de ses pouvoirs raciaux, le cristal sera un atout. Apprendre à doser l’énergie, l’envergure et la puissance utilisée. Cela se fait dans la durée. De plus, il compte bien en acquérir un autre.

— Je serai soit à Kattorin si l’hiver n’est pas terminé, soit à Douce-rive. J’attends de vos nouvelles.

Ils en avaient parlé, il n’a pas oublié. L’arbre-dieu est victime de quelque chose que tout le monde ignore suite aux actions d’une organisation, le Treizième Cercle. En plus de ses compétences, l’élémentaire a proposé de l’y accompagner tout en affirmant sa propre curiosité une fois encore. Le groupe se sépare donc à Xandrie. Duscisio y restera quelques jours avant de reprendre la route pour de nouvelles expériences.
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